Présentation de la collection
De la collection historique à la collection contemporaine, deux siècles de collections municipales
Les réserves du Fonds d'art contemporain - Paris Collections(Paris 18e).
Ville de Paris © Adagp, Paris © Sammy Baloji
La collection du Fonds d'art contemporain - Paris Collections est étroitement liée à son histoire, depuis sa création en 1816. Cette collection municipale est aujourd'hui sous-divisée en 3 ensembles. Par ordre d’importance numérique : la plus conséquente est la collection moderne, de 1914 à 1969, majoritairement composée de peintures, elle représente les deux tiers de la collection globale. La collection dite « historique » rassemble un corpus de 1600 œuvres datées d’avant 1914, le noyau initial du Fonds, principalement de sculptures en bronze. Enfin, au cœur de nos actions de diffusion et des enjeux de valorisation, la collection contemporaine, à partir de 1970, réunit tous les médiums et fait l’objet d’acquisitions annuelles, en réponse à la mission historique et toujours actuelle, de soutien aux acteurs de la création.
Chiffres clés
La collection contemporaine : de 1970 à aujourd’hui
La collection contemporaine se caractérise par une diversité des médiums (photographie, sculpture, peinture, arts graphiques, vidéo, nouveaux médias, installation, protocole, performance, médiums mixtes…), et souvent par une porosité entre ces médiums. Cette grande diversité se retrouve aussi dans les préoccupations des artistes. Les œuvres acquises de 1970 à aujourd’hui témoignent d’enjeux socio-politiques au cœur de notre société et d’une ville-monde comme Paris : l'évolution du monde urbain, la mixité socio-culturelle et le vivre-ensemble, la révolution technologique et la digitalisation du monde, la réappropriation des techniques artisanales ou encore les enjeux écologiques.
L’évolution du monde urbain
L’évolution du monde urbain a été représentée à la période contemporaine par de nombreux artistes de la collection. Ainsi, l’histoire de l’évolution de Paris est retracée dans les dessins à la limaille de fer de Nicolas Daubanes, Ministère des finances, 1871 (2020), et La Petite Roquette, Paris (2017) et dans la série d’héliogravures Déversoirs d’orage (2009) de Dove Allouche qui illustre le réseau égoutier de Paris, ou encore dans l’installation Le sol d’incertitude (2006) de Katinka Bock, qui évoque la stratification historique des pavés parisiens et l’évolution de leurs formes à travers les époques.
Des œuvres de la collection réalisées dans le cadre de commandes publiques et du 1% artistique témoignent également des évolutions urbanistiques. Tel est le cas des œuvres réalisées entre 2009 et 2012 dans le cadre de l'accompagnement artistique du tramway T3 des Maréchaux Est par le département de l’Art dans la Ville au sein du bureau des Arts visuels de la direction des Affaires culturelles de la Ville de Paris, dont provient la série de dix-neuf photographies et une installation de Mohamed Bourouissa, qui documente le quotidien des hommes et des femmes qui travaillèrent sur ces chantiers de construction.
La collection témoigne aussi de mutations urbaines bien au-delà de Paris ou des limites géographiques de la France, notamment dans des villes qui gardent les traces de l’histoire coloniale. Tel est le cas des photographies de Zineb Sedira de sa série Haunted house (2006), une bâtisse abandonnée par des pieds-noirs sur les hauteurs d’Alger, ou encore de Sammy Baloji qui représente les architectures coloniales et contemporaines dans Map of Kinkole City, one of the last fully planned zones of Kinshasa […] de sa série Urban Now (2013), et de Gaëlle Choisne dans sa sculpture Stèle (Port-au-Prince) (2020) qui représente des vestiges de l’histoire coloniale en partie détruits après le passage de l’ouragan qui a ravagé l’île d’Haïti.
La mixité socio-culturelle et le vivre-ensemble
Des artistes majeurs traitant de notions liées à la mémoire, à l’histoire, à des questions anthropologiques ou sociologiques, aux enjeux politiques (identité, migration, héritage colonial, révolutions, etc...) ont intégré le Fonds et forment un vaste corpus d’œuvres : Florence Lazar, qui étudie les enjeux de la transmission de l’histoire et de la mémoire, au l’aune des critiques postcoloniales, Kader Attia, qui explore les questions identitaires liées la division entre cultures occidentales et orientales, la vidéaste israélienne Yael Bartana qui propose une réflexion sur la question israélo-palestinienne, Mathieu Pernot, dont la série Les migrants (2009) lutte contre l’invisibilisation des personnes migrantes, Clarisse Hahn qui documente la révolte des paysans mexicains dans son film Los Desnudos (2012), ou encore Clément Cogitore dont le film Tahrir (2012) témoigne des révolutions arabes.
La révolution technologique et la digitalisation du monde
Dans les années 2000 et 2010, les artistes qui investissent le champ numérique sont peu à peu représentés dans la collection, tels Laurent Grasso et ses phénomènes scientifiques et météorologiques mutants, Loris Gréaud et l’exploration de notre mémoire collective cinématographique dans son œuvre protéiforme Sans titre (Une Prophétie) (2006) ou David Douard qui explore également les mutations technologiques et réalités augmentées.
Les nouvelles techniques de mises en mouvement des images sont employées par des artistes de la collection, tels Grégory Chatonsky, un des pionniers du Net art, qui s’intéresse avec Hisland (2008) à la place croissante dans nos sociétés de technologies d’identification et d’images générées par ordinateur, Bertrand Dezoteux, dans sa vidéo Zootrope (2019), qui mêle dessins numériques et références à la chronophotographie, ou encore Ismaël Joffroy Chandoutis, qui utilise dans sa vidéo MAALBEEK (2020) la photogrammétrie et la rotoscopie, faisant écho aux jeux vidéo et rendant poreuse la frontière entre documentaire et fiction.
La réappropriation des techniques artisanales
Les années 2000 voient aussi l’émergence de pratiques fondées sur une réappropriation des savoir-faire traditionnels. Le Fonds se dote d’œuvres de Johan Creten, sculpteur qui figure parmi les artistes de renom à avoir renouvelé la céramique, ou encore du duo de Daniel Dewar et Grégory Gicquel qui s’appuie sur des techniques artisanales pour revisiter les artefacts décoratifs et domestiques.
Plus récemment, les céramiques de la série Les Balais (2020) de Sylvie Auvray font écho aux accessoires rituels d’un animisme de l’atelier, les assemblages tech-povera d’Anna Solal incorporent des objets manufacturés récupérés, minutieusement assemblés et cousus entre eux, et les tapisseries Maps (2018-2019) de Marie-Claire Messouma Manlanbien, sont conçues par tissage de raphia, tressage et broderie, syncrétisme de sa double culture ivoirienne et guadeloupéenne.
Les enjeux écologiques
À partir des années 2000 et 2010, la collection s’enrichit peu à peu d’œuvres d’artistes sensibles aux enjeux écologiques et climatiques et qui interrogent nos rapports au vivant, tel Lois Weinberger, artiste pionnier des questions écologiques, Didier Marcel, qui étudie les frictions entre mondes rural et urbain, ou encore HeHe, dont l’installation évolutive Champs d’Ozone (2007) est inspirée par la pollution de l’air à Paris pendant la canicule de 2003.
Plus récemment, Anne-Charlotte Finel filme une nature domestiquée à la lisière des zones rurales et urbaines, Mimosa Echard assemble des matériaux naturels et industriels qui s’opposent et se contaminent par contact, et Odonchimeg Davaadorj dessine des univers fantasmés et en métamorphose, imprégnés de pensées écologiques, en particulier éco-féministes.
La collection moderne : de 1914 à 1969
La collection moderne se répartit par ordre d’importance entre un important fonds de peintures, estampes, dessins et sculptures représentant un volume de près de 17 000 œuvres. Principalement acquise lors des Salons, elle constitue le segment d’œuvres le plus important du Fonds et offre un aperçu de la diversité des expressions artistiques. Dans la première moitié du XXème siècle, elle donne à voir ces différents courants en soutenant autant l’acquisition de petits maîtres, que d’artistes majeurs.
La Tricoteuse ou Les Deux amies de René Xavier Prinet viennent par exemple illustrer des représentations d’intérieurs, quand les œuvres d’Yves Brayer s’orientent sur les paysages (Paysage des Alpilles). La modernité des artistes de l’École de Paris trouve quant à elle une résonance particulière au sein de la collection, notamment dans le domaine de la sculpture. Ainsi la Tête de femme de Constantin Brancusi, Tête d’enfant de René Iché ou encore Le fermier de Léon-Ernest Drivier constituent un ensemble d’œuvres représentatives, visible également dans l’espace public parisien. Les mouvements historiques comme le fauvisme s’illustrent par les acquisitions d’œuvres de Maurice de Vlaminck, Albert Marquet ou encore Charles Camoin. Les artistes Marie Laurencin (Enfants), Maurice Utrillo (Quai de Passy sous la neige) ou encore Léonard Foujita (Atelier de Foujita) viennent quant à eux apporter un renouveau à l’expression figurative de cette période.
La collection historique : de 1816 à 1914
La collection historique du Fonds s’est constituée à partir de l’initiative lancée en 1816 par la Préfecture du département de la Seine, d’assurer commandes et achats auprès des artistes vivants pour encourager la création. Cette démarche s’illustre par la volonté d’acquérir des artistes représentatifs des différents courants artistiques, comme le réalisme, mais également de préserver le patrimoine parisien que constituent les grands décors.
A cet égard, Pierre Auguste Caron de Beaumarchais sollicite Hubert Robert en 1790 pour concevoir le décor du salon de son hôtel particulier. L’artiste réalise un ensemble de huit paysages monumentaux de ruines, peuplées de sculptures antiques, en écho à celles qui ornent alors la cour du bâtiment. En 1818, la propriété du commanditaire est rachetée par la Ville et le grand décor imaginé par Robert est installé à l’Hôtel de Ville. En 1871, les œuvres sont épargnées par l’incendie. Quelques années plus tard, deux des panneaux sont transférés au Petit Palais, tandis que les 6 autres (Marc Aurèle, Le Gladiateur, Vénus callipyge, Laocoon, Apollon et Flore) sont installés au sein des salons de l’Hôtel de Ville où ils se trouvent toujours actuellement.
Les courants artistiques du XIX au début du XXème siècle ainsi que les genres, constituent également le témoignage de l’évolution des mœurs, des modes, du monde urbain ou encore de l’industrie. Ainsi le Quai aux fleurs de Pierre Vauthier ou Le marché à la ferraille de Luigi Loir témoignent du regard attentif de l’artiste aux transformations du paysage urbain parisien, tandis que celui de Jean André Rixens -ancien élève de Jean Léon Gérôme- s’attache à montrer le travail des ouvriers dans La fonderie. Exposée au Salon de 1892, puis donné par le mari du modèle à la Ville de Paris, le très remarqué Portrait de Madame Blondeau par Raphaël Collin, illustre autant l’élégance de la bourgeoisie que les relations de soutien entre artiste et collectionneur.
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