Retour d'expérience de Mélina Martin, médiatrice culturelle, à l'école élémentaire Arago
29 avril 2019Création d'appareils photo avec des matériaux de récupération.
Ville de Paris
L'école est un lieu très spécial pour moi. Elle est l'une des raisons pour laquelle je m'oriente vers la médiation culturelle pour le jeune public. C'est un lieu dans lequel une micro-communauté évolue, jours après jours. Une quasi seconde famille. Je suis donc intervenue à l'école Arago, dans le 13ème arrondissement. Ce lieu m'a tout de suite frappé : une très vieille structure, avec encore le vieux mobilier d'école dans certaines salles de classe. J'ai travaillé avec les enfants de cet établissement autour de l’œuvre de Rodolphe Huguet, une "fausse" caméra de surveillance en bronze, réalisée par l'artiste en 2005/2006. Ma présence était attendue et la caméra avait suscité beaucoup de questions de la part des élèves.
Cette caméra, installée dans le hall d'entrée de l'école, a été l'occasion de parler d'une multitude de choses avec les élèves.
Ce qui a surtout intéressé les plus petits, c'était le fait que l'artiste se serve d'éléments de récupération pour constituer le corps de la sculpture, avant de réaliser l'objet en lui-même. Ce fût l'occasion de produire un travail intéressant autour du "pour de faux" et du recyclage, en créant, à l'instar de l'artiste, de petits appareils photos en matériaux recyclés : briques de jus de fruit, petits bouchons venant servir de boutons et molettes, papier mâché recouvrant l'ensemble.
Avec les plus grands, L'œuvre a permis d'échanger sur la notion de surveillance en elle-même, par rapport au projet de "Villagesoussurveillance" qui a donné naissance à cette caméra présente dans l'école. Ce qui m'a le plus frappé, c'est la multitude d'exemples que les enfants ont pu donner pour illustrer cette sensation désagréable de la surveillance constante par un appareil. Certains m'ont parlé de la situation en Corée du Nord ou en Chine, d'autres ont trouvé que cela permettait de dissuader des malfaiteurs voulant s'introduire dans l'école, tandis que certains avaient peur qu'on puisse entendre tout ce qui se disait dans l'école, se référant également à des films ou encore au roman 1984 de George Orwell.
Pour ces élèves, j'ai cherché à réfléchir à un détournement possible de cette vision de la surveillance et leur ai proposé un atelier intitulé "la serrure magique". Le principe est simple : Imiter l’œil qui épie à travers le trou d'une grosse serrure médiévale pour découvrir un univers merveilleux. Les élèves devaient inventer une petite saynète supposée visible à travers le trou de la serrure, serrure qui était symbolisée par un rouleau de papier toilette dont le décor extérieur faisait référence à l'univers que l'on pouvait voir par la serrure.
L'école m'a bien accueilli ce qui a renforcé mon enthousiasme pour réaliser les ateliers. La salle d'arts plastiques était à ma disposition lorsque je venais en intervention à la journée et la grande majorité des professeurs ont été investis dans le projet, participant avec enthousiasme aux diverses séances. La classe ULIS a été particulièrement motivée, et par ma présence et par l'atelier. Des enfants très touchants au parcours atypique, extrêmement attachants, sous l'aile d'une enseignante investie et attentionnée. Les classes, certaines plus dures que d'autres, ont réalisé le projet avec plus ou moins de facilité, ce qui m'a poussé à adapter mon discours et ma façon de procéder de séances en séances.
Le dialogue avec les enfants, en classe ou devant l’œuvre m'a aussi énormément plu. Il y a eu un vif intérêt sur mon rôle à jouer dans ce projet et mon travail de médiatrice. J'ai été amené à expliquer en quoi consistait mon métier, et j'ai dû répondre à un bon nombre de questions. Par exemple, beaucoup d'enfants m'ont demandé pourquoi est-ce que j'avais choisi de faire de la médiation. Les enseignants m'ont encouragé à partager mon expérience personnelle, ce qui fût l'occasion de parler avec les élèves de l'accessibilité à la culture en générale. Il a été aussi question des différents publics : Pourquoi choisir de faire de la médiation dans des écoles ? Pourquoi auprès d'enfants ? Est-ce que j'ai déjà fait des visites et des ateliers avec des adultes ? Avec des personnes en situation de handicap ? Il y a eu beaucoup d'autres questions plus spécifiques et un partage d'expériences qui a fasciné quelques classes débordant d'enthousiasme. Une classe de CM1/CM2 – celle d'une enseignante expérimentée et investie – s'est vraiment attardée sur mon expérience et mon métier, si bien que nous avons passé quasiment une heure en classe à discuter du FMAC et de mon expérience.
L'expérience à l'école élémentaire Arago m'a aussi donné davantage envie de travailler au quotidien en contact avec des enfants d'école élémentaire. Cela n'a fait que conforter mes aspirations et la diversité des enfants m'a confirmé également le caractère unique de chaque journée au sein de l'école. Cette expérience humaine et ludique fût très enrichissante. Un grand merci à quelques enseignants de l'établissement – notamment Gaëlle Lemercier, Christelle Adam, Catherine Moiret, Dominique Heguiaphal et Charlotte Laroque - pour leur accueil et leur sympathie. Et un grand merci au FMAC à l'école pour m'avoir permis d'allier mon goût pour le monde de l'enseignement, de l'univers scolaire à celui de la médiation et des ateliers plastiques !
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