Une œuvre à l'école - 18e

L'artiste Randa Maroufi à l’école élémentaire Pierre Budin

29 janvier 2021

En ce lundi 25 janvier, dans la bibliothèque de l’école Pierre Budin, une classe de CP/CE1 s’installe, tout excitée de rencontrer Randa Maroufi, l’artiste qui a réalisé la photographie Place Houwaert, actuellement exposée à l’école.

Des élèves de l'école Budin devant l’œuvre de Randa Maroufi

Des élèves de l'école Budin devant l’œuvre de Randa Maroufi

Ville de Paris © Randa Maroufi

Pratiquant la photographie et la vidéo, Randa Maroufi est diplômée de l’Institut national des Beaux-arts de Tétouan, de l'école des Beaux-arts d’Angers ainsi que du Fresnoy - Studio National des Arts contemporains. Son travail s’articule entre le reportage, le cinéma et l’étude sociologique. Elle s’intéresse à la question du genre et à ses mécanismes de construction. Son travail joue de l’ambiguïté entre reportage et fiction, très visible dans l’œuvre exposée dans l’école.

Grande photographie sur caisson lumineux de 80cm x 120cm, Place Houwaert fait partie de la série Les Intruses. Elle met en scène des femmes investissant un bar dans un quartier populaire de Bruxelles. Ce bar est habituellement fréquenté par des hommes. Avant la prise de vue, l’artiste a prospecté plusieurs bars où il n’y avait exclusivement que des hommes et a finalement choisi ce lieu pour son décor qui permettait à la fois de voir l’intérieur et l’extérieur.

« Je ne me considère pas comme féministe mais ma démarche artistique est féministe. En m'intéressant à l'inégalité entre les hommes et les femmes dans l'espace public, mon but est de faire réfléchir sur cette question, et qu'un jour il y ait une vraie égalité. Je vais poursuivre cette série et me consacrer à cette question toute ma vie, je pense. »

Randa Maroufi, artiste

L’œuvre a déjà été étudiée par les élèves en amont de l’intervention de l’artiste, et avant même l’entrée dans la bibliothèque où est exposée l’œuvre, des questions fusent : « Pourquoi n’y a-t-il que des femmes ? », « Et qu’est-ce qu’elles font dehors la nuit au lieu de dormir ? ». Pour certains, il est impossible de concevoir que seules des femmes peuvent investir le lieu, à cause d’idées préconçues, d’autres pensent même que certaines actrices sont en réalité des hommes de par leur chevelure courte. L’idée de mise en scène semble tout à fait abstraite aux enfants, ils voient en l’œuvre un témoignage de la réalité : cette ambiguïté entre reportage et mise en scène semble fonctionner sur un public aussi jeune.

Certaines questions se portent sur le caisson lumineux qui éclaire l’œuvre. Celui-ci rappelle les enseignes publicitaires dans l’espace public qui s’éclairent la nuit.

Randa Maroufi présentant son oeuvre à des CM2 de l'école élémentaire Budin Ville de Paris © Randa Maroufi
Présentation en classe des autres œuvres de la série Ville de Paris

Suite à ces explications, l’échange se poursuit dans la classe où l’artiste présente la suite de la série. Les Intruses se composent en effet en plusieurs volets : la photographie Place Houwaert constitue le 1er volet, le 2e volet a été réalisé dans le quartier de la Goutte d’or (le quartier où se situe l’école), et l’artiste travaille actuellement sur le 3e volet qui se déroulera dans un lycée professionnel d’Aubervilliers formant aux métiers de la mécanique et de la carrosserie et où il n'y a qu'une seule fille sur 40 élèves. L’artiste montre aux enfants la vidéo de six minutes tournée dans le quartier de la Goutte d’or et les 9 photographies tirées de la vidéo, actuellement exposées dans le quartier, dans le cadre d’ Embellir Paris. Sur la vidéo, une scène intéresse et étonne particulièrement les enfants, celle du contrôle de police à la station Barbès-Rochechouart : les élèves, familiers de cet endroit, sont à la fois enjoués et intrigués. La scène ne montre que des femmes mais dans les descriptions qu’ils font de la vidéo, et de cet instant, les mots masculins affluent : « policier », « vendeurs ». Ils sont également, obnubilés par la contrebande de cigarettes et le fait que les vendeuses les cachent.

Après les petits, Randa Maroufi rencontre toutes les autres classes de l’école le 25 et aussi le 26 janvier. Avec les plus grands, elle évoque les questions techniques. Elle explique que pour réaliser cette série, elle s’entoure d’une équipe technique d’une dizaine de personnes (machinerie, lumière…) et effectue après le tournage un important travail de photomontage. Très minutieuse sur tous les détails, Randa Maroufi donne aux scènes un aspect réaliste qui frappe les élèves.

Randa Maroufi sort ravie de ces rencontres et des échanges très riches avec les élèves, étonnée de la qualité des questions posées. Suite à cette rencontre, les élèves vont travailler autour de l’œuvre avec leurs enseignants et la médiatrice culturelle Léa, en s’intéressant particulièrement à la question du genre.

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