Intervention de l’artiste Chourouk Hriech à l’école élémentaire Maurice Genevoix
29 juillet 2014 Directrice : Claire Legentil
Professeur de la Ville de Paris : Franck Cohen
Chourouk Hriech est venue répondre aux questions des enfants qui ont travaillé sur ses œuvres exposées dans l’école. Les œuvres présentées font partie d’un projet artistique développé autour du chantier de la ligne 3 du tramway et qui voulait rendre compte des bouleversements urbains et paysagers vécus par les territoires traversés par le tramway. Chourouk Hriech a ainsi suivi de 2009 à 2012 les étapes du chantier qu’elle a retranscrit dans ses dessins en noir et blanc.
Chourouk se présente et explique que son nom veut dire « lever du soleil » en arabe. Comme il a plu jusqu’au jour de sa venue où il fait grand beau, elle dit qu’elle a amené le soleil !
« Je visite des villes, je fais des photos, j’écris, puis, à partir de tout ça, je dessine le monde » dit-elle, aux enfants, captivé par sa présence dès le début de la séance. Silencieux, concentrés, ils posent de nombreuses questions :
« - Pourquoi dessinez-vous en noir et blanc ?
- En physique, quand on rassemble toutes les couleurs entre elles, on obtient du noir. Quand on les enlève toutes, cela donne du blanc. Cela fait écho aussi à la thématique du plein et du vide. Et puis j’aime travailler avec l’encre de chine noire, c’est comme si j’écrivais puisque je raconte des histoires dans mes dessins. Le blanc n’existe que parce qu’il y a le noir et vice-versa, c’est comme le bien et le mal, ils sont complémentaires. Un mot existe parce que son contraire existe.
- Il y a une fille qui est représentée plusieurs fois, qui est-ce ?
- C’est moi. Elle se balade dans les dessins. Il y a en tout 21 dessins et du 1er au 6e cette même fille sur un banc apparaît. C’est en fait moi qui traverse Paris, le paysage. C’est un autoportrait sur un banc volant, le banc étant le lieu où on observe. J’ai beaucoup observé le chantier et la construction du T3 et j’ai demandé aux gens ce qu’était le chantier pour eux.
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Pourquoi certains dessins sont-ils en négatif ?
- Certaines étapes du chantier se passent sous terre. Lorsque je marchais le long des travaux, je voyais des têtes casquées sortir des tranchées de temps en temps. Je suis descendue sous terre aussi. Il y a de nombreuses canalisations, des lumières qui clignotent, beaucoup de son (qu’on ne peut pas dessiner). J’ai dessiné comme si j’étais sous une tente, un monde qui ne se révèle que par la lumière.
- Comment avez-vous eu envie d’être artiste ?
- Je n’ai jamais vraiment voulu être artiste. J’ai remporté un prix de dessin en CE1, j’ai toujours aimé dessiner mais je pensais devenir archéologue, ou prof d’histoire. L’art a toujours été avec moi, j’ai fait 12 ans de danse. Mais l’histoire demande d’être toujours dans les livres et beaucoup de discipline. On m’a suggéré de passer les Beaux-Arts de Lyon. Quand je travaille sur des grands échafaudages, je sais me positionner grâce à mes années de danse. Être artiste c’est être dans la vie. Il ne faut jamais arrêter d’apprendre. Je travaille pour moi sur le dessin mural depuis deux ans.
- D’où vient votre inspiration ?
- Je lis beaucoup, j’observe tout le temps. Tout est source d’inspiration. Être artiste c’est un travail assidu et régulier. On m’a proposé des postes intéressants mais l’art est un espace de liberté où je suis mon propre patron.
- Combien de temps cela vous prend de faire un dessin ?
- Je réalise un travail d’archives. Je photographie les lieux pour voir leur évolution. J’adore comparer des peintures, de vieilles photos de villes avec des photos contemporaines. Mon travail porte sur le paysage et l’observation du paysage. Les personnages dans mes dessins existent en vrai. Ce sont des gens avec qui j’ai parlé, un chien qui a joué au ballon avec moi devant une pharmacie. J’ai joué avec lui et je suis revenue apporter une photocopie de mon dessin à sa maîtresse la pharmacienne.
- Pour vous l’art c’est quoi ?
- L’art c’est la vie. La vie est faite de nos rêves.
- Est-ce que vous dessinez vos rêves ?
- Je préfère les écrire mais parfois je ne trouve pas les mots alors je fais des plans. Mon dessin est figuratif, il représente le réel avec des disproportions. parfois le dessin est pénible comme lorsqu’on dessine du sable mais le résultat est très beau. Ou quand on dessine des grands formats, on peut être en équilibre sur une échelle, on engage son corps dans le dessin et cela peut être douloureux.
- Est-ce que vos dessins racontent des histoires ?
- Tous les dessins racontent une histoire. On pense raconter quelque chose en particulier mais les gens voient autre chose, une autre histoire. »
L’artiste a ponctué son discours de démonstration de dessins au tableau en utilisant la grande règle de la classe, et de danse, pour montrer l’engagement du corps dans son travail artistique. Les élèves de CM1 et CM2 ainsi que leurs enseignants étaient ravis de la visite de l’artiste.
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